Existe-t-il une distinction entre la construction sur le terrain d'autrui et l'empiètement ? 

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Il n’est pas aisé de distinguer ces deux situations mais il existe bien une distinction entre elles.

 

La première concerne l’hypothèse dans laquelle une construction litigieuse est entièrement implantée sur le sol d’autrui.

 

Elle est encadrée par les dispositions de l’article 555 du Code civil.

 

Ce régime offre une option au propriétaire en fonction de la bonne foi ou non du constructeur. En effet, le principe d’acquisition de plein droit de la construction litigieuse par le propriétaire du sol, qui n’est pas d’ordre public, est mis à mal par la mauvaise foi du constructeur.

 

Schématiquement, si le constructeur est de mauvaise foi, le propriétaire peut librement choisir entre la suppression de la construction aux frais du responsable ou la conservation de la construction litigieuse contre le versement d’une indemnisation obligatoire au profit du constructeur.

 

Si le constructeur est de bonne foi, le propriétaire du sol ne peut pas contraindre le constructeur à la démolition. Il doit au contraire lui verser une indemnité.

 

S’agissant de la seconde situation, l’empiètement concerne l’hypothèse dans laquelle une construction litigieuse est partiellement assise sur le sol d’autrui.

 

Cette situation relève du régime de l’empiètement (article 1240 du Code civil).

 

La troisième chambre civile de la Cour de cassation a jugé à plusieurs reprises que l’article 555 du Code civil ne trouve pas application lorsqu’un propriétaire empiète sur la parcelle voisine (Cour de cassation, civ. 3e, 5 déc. 2001, n° 00-13.077).

 

Dans le cadre de l’empiètement, la bonne foi ou mauvaise foi du constructeur est indifférente. Le propriétaire victime de l’empiètement est légitime à solliciter la démolition de la construction litigieuse à l’encontre du constructeur de bonne foi.

 

La jurisprudence est particulièrement sévère en la matière.

 

Par exemple, une cour d’appel a rejeté une demande de démolition des éléments de la toiture au motif de la disproportion de cette démolition en l’absence de préjudice, le toit du bâtiment n’empiétant que de 20 centimètres sur la propriété voisine.

 

La troisième chambre civile de la Cour de cassation a cassé cet arrêt au visa de l’article 545 du Code civil, rappelant que les propriétaires victimes de l’empiètement étaient en droit d’obtenir la démolition de la partie du toit empiétant sur leur propriété (Cour de cassation, civ. 3e, 10 nov. 2016, n° 15.19.561).

 

Pour rappel, l'article 545 du Code civil prévoit que : "Nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité".

 

Il n’en demeure pas moins qu’il existe des moyens de défense favorables au constructeur, sur le terrain notamment de la renonciation ou encore de la prescription acquisitive.